« Je n’ai pas de souvenirs d’enfance. Jusqu’à ma douzième année à peu près, mon histoire tient en quelques lignes ; j’ai perdu mon père à quatre ans, ma mère à six ; j’ai passé la guerre dans diverses pensions de Villard-de-Lans. En 1945, la sœur de mon père et son mari m’adoptèrent. »
W ou le souvenir d’enfance, ce sont deux histoires d’abord sans rapport, l’une fictive et l’autre réelle, mais finalement imbriquées l’une dans l’autre, indissociables et bouleversantes dans leur complémentarité. Le premier texte, en italique, imagine une île où le sport est la seule préoccupation, une île olympique aux règles complexes et inflexibles. Le deuxième texte, en romain, raconte les souvenirs épars et fragmentaires d’un petit garçon né pendant la Deuxième Guerre mondiale. Le tout fait un récit troublant aux échos dramatiques.
Le fantasme olympique se transforme au fil des pages en un camp de la mort, les hommes sont nus, la compétition et la victoire prennent le pas sur la morale ou la justice. L’île devient cauchemar, les hommes sont maintenus à l’écart des femmes et des enfants, les humiliations sexuelles remplacent les jeux sportifs. De l’autre côté, le garçon accumule les constats froids et secs, les listes de rares souvenirs conservés, les récits des premières lectures et enfin les premiers écrits. Georges Perec n’a plus de souvenir d’enfance, juste ceux de l’ « histoire avec sa grande hache ».
W ou le souvenir d’enfance de Georges Perec, Gallimard, « L’Imaginaire », 7 euros.
Fée Carabine.
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